Les ministres de l’Environnement des pays du G7 étaient réunis cette semaine à Halifax pour s’attaquer, entre autres choses, à la pollution des océans par les produits en plastique à usage unique. Le Canada a le mérite d’avoir mis cet enjeu à l’ordre du jour. Malheureusement, ses actions concrètes ne reflètent pas l’urgence d’agir contre ce fléau.
Le gouvernement Trudeau aime se présenter comme un leader en matière de lutte contre les changements climatiques et la protection de l’environnement. Il a été un participant actif de la Conférence de Paris sur le climat, a repris le dialogue avec les provinces sur ces enjeux, a créé une taxe sur le carbone et présenté plusieurs mesures environnementales.
Le Canada a aussi profité de sa présidence du G7 pour faire de la lutte contre la pollution des océans une priorité et proposer une charte en faveur de l’élimination des déchets de plastique. Le Canada interdit depuis cet été les microbilles de plastique contenues dans les produits de soin personnel.
Les gestes concrets sont toutefois rares, ce qui jette un doute sur la prétention de leadership du Canada. Prenons le cas des produits en plastique à usage unique. Le Canada veut une charte, mais n’a toujours pas de plan d’ensemble pour en réduire l’utilisation.
Pour l’instant, il offre son soutien financier à des programmes internationaux. Il a annoncé cette semaine que tout l’appareil gouvernemental fédéral réduira de 75 %, d’ici 2030, la quantité de déchets de plastique à usage unique qu’il génère. Le gouvernement utilisera aussi son pouvoir d’achat pour inciter ses fournisseurs à adopter des produits durables et un de ses programmes d’innovation industrielle encouragera la conception de solutions de rechange au plastique à usage unique.
On applaudit à ces mesures, mais elles sont nettement insuffisantes pour provoquer un virage rapide et radical comme en exige l’état actuel de la planète. Ces gestes ne font rien pour éviter de se retrouver à la sortie d’une épicerie avec, dans son panier, autant d’emballages de plastique que de nourriture. Les bouteilles, pailles, sacs, ustensiles en plastique à usage unique ne seront pas moins répandus à l’extérieur des murs fédéraux.
Au bureau de la ministre Catherine McKenna, on soutient que le fédéral n’a pas nécessairement le pouvoir d’interdire certains produits et qu’il doit travailler de concert avec les provinces, territoires et municipalités. Une réunion fédérale-provinciale à cet effet est d’ailleurs prévue en novembre, mais on n’en est qu’au début de la démarche.
Les cris d’alarme ne cessent pourtant de se multiplier depuis des mois. L’environnement, la qualité de l’eau, la santé humaine et animale sont perturbés par l’omniprésence du plastique. « D’ici 2050, il y aura plus de plastique dans les mers que de poissons », dénonce Erik Solheim, chef de l’agence des Nations unies pour l’environnement.
Pour entraîner d’autres gouvernements à sa suite, un pays doit prendre les devants avec un plan assorti de moyens. Celui du Canada se fait attendre. La consultation sur les déchets de plastique lancée le 22 avril dernier, deux mois avant le sommet de Charlevoix, n’a pris fin que vendredi, en même temps que la rencontre d’Halifax.
L’Union européenne, elle, a adopté une stratégie en janvier dernier. En mai, la Commisison européenne a soumis au Parlement et au Conseil européens une liste de règles pour réduire les déchets marins, y compris le plastique à usage unique.
Le Canada a beaucoup de chemin à faire. Malheureusement, dans ce dossier comme dans celui des changements climatiques, les préoccupations économiques prennent souvent le dessus. Le printemps dernier, Mme McKenna souhaitait « que les plastiques soient réutilisés et recyclés judicieusement, d’une façon qui avantage notre économie et notre environnement ».
Mais au Canada, seulement 11 % du plastique est recyclé, alors que la moyenne européenne est de 31 %, avec des taux supérieurs à 40 % dans les pays les plus performants, selon PlasticsEurope.
Si l’avenir de la planète avait vraiment préséance, le gouvernement n’hésiterait pas à adopter des mesures strictes pour fortement réduire, sinon éliminer, l’usage inutile du plastique. On ne réussira pas la transition vers une économie faible en carbone, on ne sauvera pas les océans sans changer profondément nos habitudes, réduire notre consommation et, finalement, faire certains sacrifices.