Lors de son passage à Tout le monde en parle au début de 2017, l’homme d’affaires Alexandre Taillefer n’a pas tari d’éloges à l’égard de la co-porte-parole de Québec solidaireManon Massé. Sans douter de la bonne foi de M. Taillefer, celui qui est depuis devenu le chef de campagne du Parti libéral du Québec a encore davantage de raisons de vanter les mérites de Mme Massé maintenant que le vote du 1er octobre est à nos portes. Chaque électeur que QS arrache à la CAQ ou au Parti québécois rapproche le PLQ de la victoire.
En 2017, M. Taillefer estimait que Mme Massé était « un actif que le Québec sous-exploite » et disait croire qu’elle « ferait une excellente ministre ». S’il est réélu, Philippe Couillard ferait-il de Mme Massé sa ministre de la lutte contre la pauvreté pour effacer la dette qu’il aurait accumulée envers elle ?
Blague à part, les stratèges libéraux doivent être reconnaissants envers Mme Massé, qui, en devenant la révélation de la campagne, a jusqu’ici nui sérieusement aux deux principaux adversaires du PLQ. Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, a beau avoir passé les trois premières semaines de la campagne en multipliant ses attaques contre la Coalition avenir Québec et son chef, François Legault, c’est QS qui semble récolter les fruits ses efforts alors que la montée du parti gauchiste correspond à la descente du parti le plus à droite sur l’échiquier politique. Cela n’enlève en rien le bien-fondé du choix des électeurs de QS. Mais c’est quand même une drôle d’élection quand des transferts de voix s’effectuent de la CAQ vers QS.
On comprend mieux alors la frustration du chef péquiste, qui a hier accusé QS d’avoir bénéficié d’une « partie gratuite » depuis le début de la campagne, et ce, après s’être attaqué sans succès à la structure atypique de QS lors du Face-à-face à TVA jeudi soir.
Quand QS ne constituait une menace que dans une poignée de circonscriptions, il était peut-être compréhensible que les gaffes de Mme Massé ou le cadre financier pour le moins discutable de QS n’accaparent pas l’attention des médias ou des électeurs. Mais si M. Couillard ou l’un des autres aspirants au poste de premier ministre avait erré en déclarant que l’anglais constituait une langue officielle du Québec, pensez-vous qu’on l’aurait ménagé comme on l’a fait dans le cas de Mme Massé ?
Manifestement, la langue n’est pas au coeur des préoccupations de Mme Massé, qui n’est pas entrée en politique principalement pour protéger l’identité québécoise. Son engagement politique tourne autour de l’instauration d’un autre modèle de développement économique, durable selon elle, et dont la réalisation nécessitera inévitablement l’indépendance du Québec.
En attendant, QS propose d’augmenter l’impôt des particuliers et des entreprises par plus de quatre milliards de dollars par année — sans parler des neuf autres milliards en « nouvelles sources de revenus et d’économies » qu’énumère son cadre financier — alors que le fardeau fiscal des Québécois est déjà plus lourd qu’ailleurs en Amérique du Nord. On a beau dire vouloir gouverner d’une « autre façon », QS ne peut pas faire abstraction du fait que notre économie évolue toujours dans un système capitaliste mondial qui n’est pas à la veille de reconnaître l’exception québécoise. Quand Mme Massé dit que QS irait « chercher l’argent » que les gouvernements libéraux et péquistes successifs n’ont pas eu le « courage » d’aller chercher, c’est sans doute de la musique aux oreilles de la base anticapitaliste de QS. Mais la fuite de capital qu’entraînerait l’adoption des mesures solidaires laisserait l’État québécois dans une bien mauvaise position pour réaliser toutes les promesses que Mme Massé a faites depuis le début de la campagne.
« Êtes-vous un parti révolutionnaire socialiste ? » a demandé à Mme Massé le président de la Chambre du commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, après son discours devant la CCMM jeudi dernier. Les gens d’affaires qui avaient assisté à son discours n’avaient pas à attendre sa réponse pour tirer leur propre conclusion.
Si jamais QS détient la balance du pouvoir dans une prochaine législature, quelles seront ses exigences budgétaires envers un gouvernement caquiste ou libéral ? Déjà, l’idée de QS de vider le Fonds des générations pour financer sa lutte contre les changements climatiques a de quoi faire sourciller. Si l’engagement de QS envers la lutte contre les gaz à effet de serre mérite d’être salué, il propose systématiquement les méthodes les plus chères et les moins efficaces pour y arriver. Réaffecter les 12,5 milliards en versements prévus du Fonds des générations pour financer des mesures chères aux environnementalistes, mais qui ne donnent pas des résultats concluants, serait une trahison.
Qu’on ne se méprenne pas, Mme Massé demeure la révélation de cette campagne, non pas pour ses promesses irréalistes, mais pour son comportement exemplaire et pour l’humanisme et l’authenticité qu’elle dégage. En sachant mobiliser les jeunes, elle rend un grand service à la démocratie québécoise. Mais en démocratie, il ne devrait jamais y avoir des parties gratuites.
Une précédente version de ce texte, qui évoquait la liquidation du Fonds des générations plutôt que la réaffectation des versements futurs, a été corrigée.
Moins de la moitié des jeunes Américains ont une vision positive du capitalisme, selon un nouveau sondage. Même les jeunes républicains sont de plus en plus sceptiques – mais ne vous attendez pas à ce que l’Amérique devienne complètement socialiste pour l’instant.
Un sondage Axios publié vendredi a révélé qu’aux États-Unis capitalistes, seulement 49% des Américains âgés de 18 à 34 ans soutiennent réellement le capitalisme. Et 51% déclarent avoir une vision positive du socialisme.
Depuis plusieurs années, les sondages ont trouvé un soutien au socialisme croissant parmi les démocrates et les jeunes. En conséquence, les démocrates qui se présentent sur des plateformes explicitement socialistes – comme les membres des Democratic Socialists of America Alexandria Ocasio-Cortez (D-New York) et Rashida Tlaib (D-Michigan) – ont traduit ce mécontentement en succès électoral.
Cependant, le dernier sondage a révélé que les jeunes républicains, généralement des défenseurs infatigables du capitalisme de libre marché, en ont marre du système qu’ils ont l’habitude de défendre. Parmi les républicains âgés de 18 à 34 ans, environ 66% ont désormais une vision positive du capitalisme, contre 81% en 2019. Mais 56% des jeunes républicains souhaitent que le gouvernement se concentre sur la réduction des inégalités de richesse, contre seulement 40% en deux ans. depuis.https://googleads.g.doubleclick.net/pagead/ads?us_privacy=1—&client=ca-pub-5390986774482540&output=html&h=280&adk=180704450&adf=4168993513&pi=t.aa~a.2874080257~i.7~rp.4&w=1092&fwrn=4&fwrnh=100&lmt=1628065615&num_ads=1&rafmt=1&armr=3&sem=mc&pwprc=5987108905&psa=1&ad_type=text_image&format=1092×280&url=https%3A%2F%2Fnews-24.fr%2Fmeme-les-jeunes-republiques-se-lassent-du-capitalisme-selon-les-sondeurs-americains-rt-usa-news%2F&flash=0&fwr=0&pra=3&rh=200&rw=1092&rpe=1&resp_fmts=3&wgl=1&fa=27&dt=1628065633854&bpp=2&bdt=2280&idt=-M&shv=r20210729&mjsv=m202108030101&ptt=9&saldr=aa&abxe=1&cookie=ID%3D5bc0ba73a725e77e-2207b6abaeca00da%3AT%3D1628065618%3ART%3D1628065618%3AS%3DALNI_MbfJtFs3LXLAMzQhf9X_KnK26CNWQ&prev_fmts=0x0%2C1092x280%2C1092x280%2C1092x280&nras=3&correlator=4582349290288&frm=20&pv=1&ga_vid=188329949.1628065617&ga_sid=1628065633&ga_hid=1441312153&ga_fc=0&u_tz=330&u_his=4&u_java=0&u_h=720&u_w=1280&u_ah=680&u_aw=1280&u_cd=24&u_nplug=0&u_nmime=0&adx=85&ady=1595&biw=1263&bih=567&scr_x=0&scr_y=416&eid=20211866&oid=3&pvsid=4333132958230926&pem=75&eae=0&fc=1408&brdim=-7%2C-7%2C-7%2C-7%2C1280%2C0%2C1295%2C695%2C1280%2C567&vis=1&rsz=%7C%7Cs%7C&abl=NS&fu=128&bc=31&ifi=5&uci=a!5&btvi=3&fsb=1&xpc=dqEjBFITRH&p=https%3A//news-24.fr&dtd=358
Axios attribue cette augmentation au fait que davantage d’Américains voient le « avantages tangibles de niveaux d’intervention gouvernementaux sans précédent » pendant la pandémie de coronavirus. En effet, le président de l’époque, Donald Trump, a critiqué les deux partis au Congrès pour avoir accepté d’envoyer « ridiculement bas » chèques de relance de 600 $ en décembre, au lieu des 2 000 $ qu’il a réclamés – une critique qui aurait été étrangère à un président républicain au cours des dernières décennies. Tout aussi rarement, Ocasio-Cortez et Tlaib étaient tous deux d’accord avec Trump sur la question.
Pourtant, l’abandon par la droite du capitalisme sans entraves est en cours depuis avant que la pandémie ne frappe. L’animateur de Fox News, Tucker Carlson, l’animateur de nouvelles du câble le plus regardé aux États-Unis et une influence sur Trump pendant son mandat à la Maison Blanche, a soutenu les propositions des démocrates visant à briser les monopoles technologiques de la Silicon Valley et a condamné « républicain grand public » se concentrer sur le « religion » de « capitalisme de marché ».
Andreas Malm est un très sympathique quadragénaire suédois, militant de longue date contre le réchauffement climatique. Invité à Paris par son éditeur, La Fabrique, à l’occasion de la publication en France de son dernier ouvrage, il a par conviction traversé l’Europe en train, au départ de Malmö. Géographe spécialisé en écologie humaine de l’université de Lund, en Suède, il propose notamment une analyse du mouvement climat au sein de la vie politique suédoise (longtemps sous hégémonie sociale-démocrate), lui qui est originaire du même pays que Greta Thunberg. En septembre dernier, il a publié La Chauve-souris et le capital. Stratégie pour l’urgence chronique.
Andreas Malm est par ailleurs membre du collectif Zetkin, composé de chercheurs, d’enseignants et d’activistes de plusieurs nationalités œuvrant à la préservation du climat et de la biodiversité. Ce groupe s’intéresse notamment aux discours sur l’écologie politique de l’extrême droite européenne ou américaine. Malm a ainsi dirigé l’ouvrage collectif Fascisme fossile. L’extrême droite, l’énergie, le climat, qui met au jour la longue tradition de dénégation des enjeux climatiques due à l’engouement de l’extrême droite pour un développement fait de croissance économique constante grâce aux énergies fossiles.
Plus largement, il analyse ici la crise climatique, qu’il conçoit aujourd’hui comme intrinsèquement liée à la conjonction entre la crise sanitaire due au covid-19, source d’un effondrement de l’expansion capitalistique, et la destruction de la biodiversité, permettant la dispersion géographique des zoonoses. Le tout dans un mouvement incessant. En attendant la prochaine pandémie…
On parle généralement d’urgence climatique. Pourquoi lui préférez-vous celui d’« urgence chronique » ?
Andreas Malm : J’ai repris ce terme d’une étude de plusieurs scientifiques qui ont analysé la crise du covid-19 (notamment ses causes) et la crise climatique. Il traduit l’idée que ces deux désastres sont en train de devenir permanents, et non plus temporaires, l’un après l’autre : l’urgence apparaît donc comme chronique. Et la seule voie pour nous en sortir, c’est désormais d’agir contre les causes de ces crises, d’en modifier les conditions de développement.
Vous écrivez que le capitalisme, « survivant à tous ses hôtes », a longtemps semblé un « parasite qui ne meurt jamais », mais qu’il pourrait bien aujourd’hui avoir rencontré des « limites naturelles » à son « espérance de vie ». Que voulez-vous dire ?
Le capitalisme rencontre de réels problèmes, en raison de ce qu’il faut appeler ses « limites naturelles ». Toutefois, je ne crois pas que les problèmes environnementaux puissent causer son déclin avant qu’il ne parvienne à entraîner l’effondrement de la planète tout entière. Si le capitalisme a la possibilité de continuer ainsi dans la voie incontrôlée dans laquelle il se trouve, sans aucune régulation ni limitation, il ne pourra certainement causer – sans possibilité de retour – qu’un processus croissant vers une destruction incommensurable du climat, de la biodiversité et de tout le reste…
Je ne distingue aucune autre voie que la coercition pour obtenir des entreprises qu’elles changent leurs comportements.
Certains marxistes pensent que les problèmes environnementaux pourront être la cause d’une crise majeure du capitalisme et entraîner, à terme, sa chute. Même s’ils ne disposent pas vraiment de preuves à l’appui de cette thèse, on peut bien sûr interpréter le covid-19 (et la crise économique qu’il entraîne) comme un exemple potentiel de ce processus : celui d’un phénomène environnemental causant une maladie zoonotique ayant eu pour conséquence une crise économique majeure au début de la décennie 2020. Toutefois, le covid-19 n’a certainement pas tué le capitalisme. Et je ne pense pas que quelque chose puisse annihiler le système capitaliste, sauf certains processus sociaux précis par lesquels de nombreuses forces humaines s’organisent pour travailler ensemble dans les mêmes directions contre ce système. Mais je ne crois pas qu’une crise environnementale parviendra jamais à elle seule à causer la fin du capitalisme !
La critique du capitalisme est une sorte de passage obligé pour un homme politique en difficulté en France. Elle est pratique parce qu’elle séduit sur un assez large spectre, de gauche à droite. On pourrait donc considérer cette déclaration comme un simple exercice de rhétorique sans grande importance, mais ce faisant on commettrait une erreur, car cette expression révèle beaucoup sur la grande difficulté de l’Europe et surtout de la France à établir un diagnostic pertinent sur leur déclin accéléré.
En se trompant de diagnostic, on s’interdit de résoudre le problème. L’exercice se révèle donc dangereux.
L’appel à un capitalisme « responsable » par le président de la République est bien sûr avant tout une tactique politique. Nous sommes en période électorale et il s’agit probablement pour lui de parler à la gauche en essayant de faire oublier son image libérale, c’est de bonne guerre.
En critiquant un capitalisme devenu « fou », il est certain de marquer des points, même si cela ne repose sur aucun fait tangible. Mais au-delà d’agiter de vieux épouvantails, cette déclaration pose deux problèmes : le premier, c’est qu’elle sert à faire diversion sur les dysfonctionnements de l’État, et le second c’est qu’elle traduit un diagnostic erroné sur l’état du capitalisme en Europe.
Exiger un capitalisme « responsable », une diversion
Prôner un capitalisme responsable, c’est tenter de faire diversion pour éviter de poser la question de la responsabilité de l’État. Rappelons que celui-ci a abordé la crise de la Covid en ayant détruit les stocks de masques, puis a officiellement expliqué aux Français que le port du masque était inutile, et que de toute façon ils étaient trop bêtes pour savoir en mettre un.
Il a ensuite fallu près d’une année à cet État pour mettre en place une campagne de tests systématiques et les débuts de la campagne de vaccination ont été une série d’humiliants dysfonctionnements très largement constatés sur lesquels il n’est pas utile de revenir. La seconde vague a été abordée sans qu’aucune capacité supplémentaire n’ait été créée en réanimation, ce qui a nécessité un nouveau confinement pour éviter l’engorgement des services.
Après 18 mois de Covid, le collège public de mes enfants n’a pas organisé une seule heure d’enseignement à distance via un logiciel de téléconférence, et son application d’espace numérique de travail date visiblement des années 1990 ; elle s’est d’ailleurs effondrée dès les premiers jours d’arrêt des cours présentiels. Dès les premiers jours du confinement, la Poste a quasiment cessé de fonctionner.
Et ce ne sont là que les défaillances directement liées à l’épidémie. On comprend que le chef de l’État souhaite parler d’autre chose que la réforme de l’État, et faire diversion… Au Moyen-Âge, quand les choses tournaient mal, on brûlait des sorcières. En France, on brûle le capitalisme, éternel bouc émissaire.
Cette critique est particulièrement mal venue aujourd’hui, car si la crise de la Covid a montré une chose, c’est que le capitalisme est profondément responsable, au sens le plus large qu’on puisse donner à ce terme. Après des semaines de blocage résultant d’une gestion catastrophique des masques, et alors que des professionnels de santé mouraient de leur absence, l’État s’est finalement résolu à ouvrir leur approvisionnement et leur distribution au secteur privé, bref, au capitalisme, et la pénurie a disparu en moins de deux semaines.
Capitalisme irresponsable ? Quand est arrivé le confinement, tout le monde a craint les pénuries et certains n’ont pas hésité à prophétiser l’effondrement du système. Rien ne s’est effondré et il n’y a eu aucune pénurie. La grande distribution, victime traditionnelle des discours bien-pensants, a nourri la France malgré des conditions extrêmes.
Capitalisme irresponsable ? Puis à partir de décembre 2020, Pfizer, BioNTech et Moderna, purs produits du capitalisme spéculatif que l’on se plait à décrier, ont sauvé des millions de vies humaines avec leurs vaccins et permis à nos économies de repartir, un exploit que quelques mois auparavant, les bien-pensants – encore eux- au premier rang desquels notre Président, jugeaient impossible.